Le marché des logiciels métiers pour les collectivités territoriales arrive en phase de stabilisation. Si la différence se faisait jadis par des pans fonctionnels plus ou moins bien couverts, aujourd’hui les logiciels se valent fonctionnellement de plus en plus.
Dans ce contexte, l’un des éléments qui peut enfin faire la différence est l’ergonomie du logiciel. Une problématique que les collectivités, et les éditeurs, doivent absolument considérer dans leurs choix.
Contexte : une stabilisation du marché
Le marché des progiciels métiers pour les collectivités locales arrive aujourd’hui à un carrefour. Plusieurs facteurs se stabilisent en même temps.
La fin d’une phase de rachat
Dans certains domaines, nous assistons aujourd’hui à la fin d’une phase de rachats entre les acteurs. Le marché devient alors restreint : 3 ou 4 acteurs crédibles par strate de collectivité.
C’est par exemple le cas des domaines RH et Finances, avec des rachats divers ces dernières années. C’est également le cas du domaine Services techniques avec deux acteurs majeurs seulement.
A noter que cette situation n’est pas tout à fait homogène. Il est vraisemblable que cela se produise aussi pour d’autres domaines où les acteurs sont encore nombreux (domaine Enfance notamment).
L’ouverture du logiciel enfin acceptée par les éditeurs
Là où 5 ans auparavant la plupart des logiciels ne savaient bien communiquer qu’avec eux-mêmes, on assiste aujourd’hui à un développement des connecteurs permettant d’intégrer le logiciel avec d’autres éléments du système d’information :
- parapheur électronique pour les logiciels manipulant des documents à valider,
- GED pour le stockage centralisé des fichiers,
- identification par France Connect pour les portails et téléservices usagers.
Les éditeurs proposent toujours leur propre brique pour ces fonctionnalités. Toutefois, ce qui était une méthode commerciale permettant de rendre leurs clients captifs s’est transformé en une simple facilité offerte pour les collectivités ne disposant pas par ailleurs de composants centralisés.
Ceux qui ont déjà leur parapheur, leur GED, ou d’autres outils transversaux, peuvent désormais les interconnecter sans problème et, la plupart du temps, ne pas les payer deux fois.
Un périmètre fonctionnel stabilisé
La plupart des éditeurs ont désormais rattrapé leur retard. Pour un domaine donné, ils couvrent tous globalement les mêmes pans fonctionnels.
A titre d’exemples :
- la plupart des logiciels Finances disposent d’un module de gestion financière des marchés publics,
- la plupart des logiciels RH disposent d’un module de gestion de la formation,
- la plupart des logiciels Enfance peuvent gérer les structures petite enfance et jeunesse.
Conséquence : l’ergonomie peut devenir un critère de sélection
Il y a encore quelques années, les consultations que nous sortions pour l’acquisition de logiciels métiers se basaient principalement sur une analyse des fonctionnalités des différents candidats. Aujourd’hui, force est de constater que ce critère n’est plus différenciant.
Sur nos 5 dernières analyses de marchés logiciels, l’écart entre les candidats sur le critère fonctionnel est de l’ordre de 10% seulement.
Dans ces conditions, il est maintenant possible de donner plus d’importance à d’autres critères. Et celui qui arrive en tête, trop longtemps relégué à une part symbolique, c’est l’ergonomie.
Ça tombe bien, c’est indispensable !
Combien de fois avez-vous entendu vos utilisateur qualifier leur logiciel « d’usine à gaz » ? Quel est le taux de demandes d’assistance informatique portant sur des problèmes d’utilisation des logiciels métiers ? Ces indicateurs ne mentent pas. Les utilisateurs rencontrent aujourd’hui des problèmes majeurs d’utilisation quotidienne de leurs outils métiers. Et ce pour plusieurs raisons qu’il est intéressant de détailler.
Le turnover parfois important dans les services
Avec l’augmentation de la mobilité des agents dans la fonction publique, le turnover dans les services devient un phénomène majeur. Pour la maîtrise des logiciels, l’impact est direct.
Lors de nos analyses de l’existant, nous observons parfois des services entiers dans lesquels aucun des agents présents n’a suivi de formation structurée au logiciel. Leur connaissance de l’outil se limite à un transfert de compétence de leurs collègues, qui parfois eux-mêmes n’avaient pas suivi de formation.
La conséquence directe de ce turnover est la perte importante de maîtrise des outils, et donc une sous-utilisation des logiciels.
Un grand classique que nous observons : des utilisateurs qui demandent dans le futur logiciel des fonctionnalités qui existent déjà dans le leur…
La perte d’expertise métier
Cette observation nous est confirmée par les éditeurs logiciels : un nombre croissants de demandes d’assistance ne concernent pas l’utilisation du logiciel, mais le métier lui-même. La hotline se transforme en centre de conseil voire de formation aux procédures métiers.
Cas typique : la demande de fonctionnalité allant à l’encontre des règles juridiques.
La génération Z, ou le dogme du presse-bouton
Nous avons cru, comme tout le monde, que la génération qui arrive pourrait se saisir de n’importe quel logiciel comme un poisson dans l’eau.
Douche froide ! La nouvelle génération n’est pas née avec un ordinateur dans les mains, mais un smartphone. C’est à dire un outil pensé, conçu et fabriqué précisément pour retirer à l’utilisateur toute forme de complexité.
Pour le comprendre il suffit d’observer 3 phénomènes :
- Aucun smartphone, aucune application mobile ne sont fournis avec un mode d’emploi.
- Les applications mobiles les plus utilisées contiennent très peu de fonctionnalités (à commencer par chaque application sociale qui ne propose finalement que quatre fonctions : publication, like, commentaire et partage).
- Une application dont l’utilisateur ne comprend pas le fonctionnement en quelques secondes ne sera jamais rouverte.
En bref, la génération qui arrive est encore plus réfractaire que les autres aux outils complexes.
Des logiciels enfin ergonomiques ?
On est obligés de laisser un point d’interrogation sur ce titre. La situation est en effet loin d’être homogène, mais voici ce que nous pouvons dire.
D’abord, depuis 40 ans que les logiciels existent, les commerciaux en vantent l’ergonomie. Toujours. Systématiquement. Pas de quoi les blâmer, le critère d’ergonomie est difficilement objectivable, et le talent de présentation joue beaucoup sur le ressenti du public.
Ensuite, les ajouts fonctionnels continuels faits ces dernières années n’aident pas. À force d’ajouter des rustines, l’interface finit par ressembler à un tableau de bord d’Airbus.
Toutefois, nous observons ces deux dernières années une prise en compte de cette problématique :
- embauche d’ergonomes,
- refonte complète d’interfaces graphiques,
- homogénéisation des écrans entre les différentes fonctionnalités,
- adoption des standards ergonomiques issus des interfaces web (position des éléments, menus horizontaux, moteurs de recherche transversaux, etc.).
Avec la maturité fonctionnelle des logiciels métiers et face à des utilisateurs de plus en plus exigeants, l’ergonomie du logiciel va enfin devenir un critère de choix prépondérant pour les collectivités dans les prochaines années.
Espérons que les éditeurs se saisiront réellement de cette problématique. Une chose est sûre : celui qui saura réellement séduire par son ergonomie se taillera la part du lion sur les marchés à venir.
Que le plus « user-friendly » gagne !
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